Epreuve E3C : Histoire Géographie, Géopolitique et Sciences Politiques
Voie : Bac général
Niveau d’études : Classe de première
Session : 2025
Durée de l’épreuve : 2 heures
Axes de programme : Les pouvoirs de la parole.
Calculatrice : Interdite
Dictionnaire : Interdit
Numéro du sujet : G1SHLEH02663
Extrait de l’annale :
Si vous voulez remonter à l’origine de ce qu’on appelle éloquence, soit que
vous la regardiez comme un fruit de l’étude, un effet de l’art ou de l’exercice, ou un talent naturel, vous trouverez qu’elle doit sa naissance à la plus noble cause et aux motifs les plus honorables.
En effet, il fut un temps où les hommes, errant dans les campagnes comme
les animaux, n’avaient pour soutenir leur vie qu’une nourriture sauvage et
grossière. La raison avait peu d’empire ; la force décidait de tout. Ces barbares n’avaient nulle idée de leurs devoirs envers la divinité ni envers leurs semblables ;
point de mariage légal, point d’enfants dont on pût s’assurer d’être le père ; on ne sentait point encore les avantages de l’équité. Aussi, au milieu des ténèbres de l’erreur et de l’ignorance, les passions aveugles et brutales asservissaient l’âme, et abusaient, pour se satisfaire, des forces du corps, leurs pernicieux satellites. Sans doute, dans ces temps de barbarie, un homme s’est rencontré d’une sagesse et d’une vertu supérieures, qui reconnut combien l’esprit humain était propre aux plus grandes choses, si l’on pouvait le développer et le perfectionner en l’éclairant. A sa voix, les hommes dispersés dans les champs, ou cachés dans le fond des forêts, se rassemblent et se réunissent dans un même lieu. Il inspire tous les goûts honnêtes et utiles à ces cœurs farouches, qui veulent rejeter d’abord un joug dont la nouveauté les révolte mais qui pourtant, sensibles à l’éloquence de la sagesse, deviennent enfin humains et civilisés, de féroces et barbares qu’ils étaient auparavant. Et ce n’était point, ce me semble, une sagesse muette et sans éloquence, qui pouvait opérer une révolution si prompte, arracher les hommes à l’empire de l’habitude, et les amener à un genre de vie si différent du premier.
Mais, les villes une fois établies, comment apprendre aux hommes à respecter la justice, à pratiquer la bonne foi, à obéir volontairement aux autres, à supporter les plus pénibles travaux, à sacrifier leur vie même pour le bien public, si l’éloquence n’était venue leur persuader les vertus découvertes par la raison ? Oui, sans doute, il fallut tout le charme d’une éloquence à la fois profonde et séduisante, pour amener sans violence la force à plier sous le joug des lois, à descendre au niveau de ceux sur lesquels elle pouvait dominer, à renoncer enfin aux plus douces habitudes dont le temps avait fait une seconde nature. Tels furent l’origine et les progrès de l’éloquence, qui, par la suite, décida des plus grands intérêts, et dans la paix et dans la guerre, et rendit aux hommes les plus importants services.
Cicéron, De l’invention, I, 1 (Ier siècle av. J.-C.), traduction de Charles Nisard.
Question d’interprétation littéraire :
Selon Cicéron, qu’apporte l’éloquence aux hommes ?
Question de réflexion philosophique :
L’éloquence sert-elle toujours des causes honorables ?
Pour construire votre réponse, vous vous référerez au texte ci-dessus, ainsi qu’aux lectures et connaissances, tant littéraires que philosophiques, acquises durant l’année.