Bac Général
Classe : Terminale
Centre d’examen : Amérique du Nord
Matière : Humanités, littérature et philosophie
Année : 2024
Session : Normale
Durée de l’épreuve : 4 heures
Repère de l’épreuve : 24-HLPJ2AN1
L’usage de la calculatrice et du dictionnaire n’est pas autorisé.
Répartition des points :
Première partie : 10 points
Deuxième partie : 10 points
Ce sont les esprits forts et les esprits malins, les plus forts et les plus malins qui ont fait faire jusqu’ici le plus de progrès à l’humanité : ils ont rallumé constamment les passions qui allaient s’endormir – toute société policée(1) les endort –, ils ont réveillé constamment l’esprit de comparaison et de contradiction, le goût du neuf, du risqué, de l’inessayé ; ils ont obligé l’homme à opposer sans cesse les opinions aux opinions, les idéals aux idéals(2). Par les armes le plus souvent, en renversant les bornesfrontières, en violant les piétés, mais aussi en fondant de nouvelles religions, en créant de nouvelles morales ! Cette « méchanceté » qu’on retrouve dans tout professeur de nouveau, dans tout prédicateur de choses neuves, c’est la même « méchanceté » qui discrédite le conquérant, bien qu’elle s’exprime plus subtilement et ne mobilise pas immédiatement le muscle ; – ce qui fait d’ailleurs qu’elle discrédite moins fort ! – Le neuf, de toute façon, c’est le mal, puisque c’est ce qui veut conquérir, renverser les bornes-frontières, abattre les anciennes piétés ; seul l’ancien est le bien ! Les hommes de bien, à toute époque, sont ceux qui plantent profondément les vieilles idées pour leur faire porter fruit, ce sont les cultivateurs de l’esprit. Mais tout terrain finit par s’épuiser, il faut toujours que la charrue du mal y revienne.
Friedrich NIETZSCHE, Le Gai Savoir (1882)
(traduction A. Vialatte)
(1) Policée : organisée, disciplinée.
(2) Idéals : équivalent d’« idéaux ».
Première partie : interprétation littéraire
Comment l’auteur défend-il dans ce texte « le nouveau », contre l’opinion commune ?
Deuxième partie : essai philosophique
Selon vous, le « goût du neuf, du risqué, de l’inessayé » suffit-il à définir le rôle de l’écrivain ou de l’artiste ?