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Spécialité HLP Métropole Jour 1 Bac Général Session de Remplacement 2022

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Bac Général
Classe : 
Terminale
Centre d’examen :
 Métropole
Matière : Humanités, littérature et philosophie
Année : 2022
Session : Remplacement
Durée de l’épreuve : 4 heures
Repère de l’épreuve : 22-HLPJ1ME3
L’usage de la calculatrice et du dictionnaire n’est pas autorisé.

Répartition des points :
Première partie : 10 points
Deuxième partie : 10 points

Le candidat traite au choix le sujet 1 ou le sujet 2

SUJET 1
La désobéissance civile ne saurait être assimilée à la délinquance de droit
commun1. Il existe une différence essentielle entre le criminel qui prend soin de dissimuler à tous les regards ses actes répréhensibles et celui qui fait acte de désobéissance civile en défiant les autorités et s’institue lui-même porteur d’un autre droit. Cette distinction nécessaire entre une violation ouverte et publique de la loi et une violation clandestine a un tel caractère d’évidence que le refus d’en tenir compte ne saurait provenir que d’un préjugé allié à de la mauvaise volonté. Reconnue désormais par tous les auteurs sérieux qui abordent ce sujet, cette distinction est naturellement invoquée comme un argument primordial par tous ceux qui s’efforcent de faire reconnaître que la désobéissance civile n’est pas incompatible avec les lois et les institutions publiques des États-Unis. Le délinquant de droit commun, par contre, même s’il appartient à une organisation criminelle, agit uniquement dans son propre intérêt ; il refuse de s’incliner devant la volonté du groupe, et ne cédera qu’à la violence des services chargés d’imposer le respect de la loi. Celui qui fait acte de désobéissance civile, tout en étant généralement en désaccord avec une majorité, agit au nom et en faveur d’un groupe particulier. Il lance un défi aux lois et à l’autorité établie à partir d’un désaccord fondamental, et non parce qu’il entend personnellement bénéficier d’un passe-droit.
Hannah Arendt, Du mensonge à la violence (1972)
– traduit de l’anglais par Guy Durand.

1 Le délinquant de droit commun est celui qui commet un délit ou un crime, au regard des règles établies du droit.

Première partie : interprétation littéraire
Pourquoi Hannah Arendt distingue-t-elle le criminel de celui qui fait acte de
désobéissance civile ?

Deuxième partie : essai philosophique
Écrire est-il un acte de désobéissance ?

SUJET 2
Elle se croyait même au début d’une période heureuse et tranquille quand la mort de sa mère vint la frapper en plein cœur. Ce fut, pendant les premiers jours, un de ces désespoirs profonds qui ne laissent place à nulle autre pensée. Elle restait du matin au soir abîmée dans la désolation, cherchant à se rappeler mille choses de la morte, des paroles familières, sa figure d’autrefois, des robes qu’elle avait portées jadis, comme si elle eût amassé au fond de sa mémoire des reliques, et recueilli dans le passé disparu tous les intimes et menus souvenirs dont elle alimenterait ses cruelles rêveries. Puis quand elle fut arrivée ainsi à un tel paroxysme1 de désespoir, qu’elle avait à tout instant des crises de nerfs et des syncopes2, toute cette peine accumulée jaillit en larmes, et, jour et nuit, coula de ses yeux.
Or, un matin, comme sa femme de chambre entrait et venait d’ouvrir les volets
et les rideaux en demandant : « Comment va Madame aujourd’hui ? », elle répondit, se sentant épuisée et courbaturée à force d’avoir pleuré : « Oh, pas du tout.
Vraiment, je n’en puis plus. »
La domestique qui tenait le plateau portant le thé regarda sa maîtresse, et émue de la voir si pâle dans la blancheur du lit, elle balbutia avec un accent triste et sincère :
— En effet, Madame a très mauvaise mine. Madame ferait bien de se soigner.
Le ton dont cela fut dit enfonça au cœur de la comtesse une petite piqûre comme d’une pointe d’aiguille, et dès que la bonne fut partie, elle se leva pour aller voir sa figure dans sa grande armoire à glace.
Elle demeura stupéfaite en face d’elle-même, effrayée de ses joues creuses, de ses yeux rouges, du ravage produit sur elle par ces quelques jours de souffrance. Son visage qu’elle connaissait si bien, qu’elle avait si souvent regardé en tant de miroirs divers, dont elle savait toutes les expressions, toutes les gentillesses, tous les sourires, dont elle avait déjà bien des fois corrigé la pâleur, réparé les petites fatigues, détruit les rides légères apparues au trop grand jour, au coin des yeux, lui sembla tout à coup celui d’une autre femme, un visage nouveau qui se décomposait, irréparablement malade.
Pour se mieux voir, pour mieux constater ce mal inattendu, elle s’approcha
jusqu’à toucher la glace du front, si près que son haleine, répandant une buée sur le verre, obscurcit, effaça presque l’image blême qu’elle contemplait. Elle dut alors prendre un mouchoir pour essuyer la brume de son souffle, et frissonnante d’une émotion bizarre, elle fit un long et patient examen des altérations de son visage. D’un doigt léger elle tendit la peau des joues, lissa celle du front, releva les cheveux, retourna les paupières pour regarder le blanc de l’œil. Puis elle ouvrit la bouche, inspecta ses dents un peu ternies où des points d’or brillaient, s’inquiéta des gencives livides et de la teinte jaune de la chair au-dessus des joues et sur les tempes.
Elle mettait à cette revue de la beauté défaillante tant d’attention qu’elle n’entendit pas ouvrir la porte, et qu’elle tressaillit jusqu’au cœur quand sa femme de chambre, debout derrière elle, lui dit :
— Madame a oublié de prendre son thé.
La comtesse se retourna, confuse, surprise, honteuse, et la domestique, devinant sa pensée, reprit :
— Madame a trop pleuré, il n’y a rien de pire que les larmes pour vider la peau. C’est le sang qui tourne en eau.
Guy de Maupassant, Fort comme la mort, (1889).
1 « paroxysme » : stade le plus élevé
2 « syncopes » : pertes de connaissance

Première partie : interprétation littéraire
Que révèle ici la métamorphose physique ?

Deuxième partie : essai philosophique
La souffrance a-t-elle un effet sur ce que je suis ?