Bac Général
Classe : Terminale
Centre d’examen : Amérique du Nord
Matière : Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques
Année : 2022
Session : Normale
Durée de l’épreuve : 4 heures
Repère de l’épreuve : 22-HGGSPJ1AN1
L’usage de la calculatrice et du dictionnaire n’est pas autorisé
Répartition des points :
Dissertation : 10 points
Étude critique : 10 points
Le candidat traitera un sujet de dissertation au choix parmi les sujets 1 et 2 ET l’étude critique de document(s).
Sujet de dissertation 1
Juger les génocides et les crimes de masse, une justice uniquement internationale ?
Sujet de dissertation 2
La question environnementale aux États-Unis, un objet de tensions entre différents acteurs ?
Étude critique de documents : La dimension politique de la guerre
En analysant le document et en vous appuyant sur vos connaissances, vous
montrerez les différentes formes prises par les conflits interétatiques jusqu’aux guerres napoléoniennes.
Document 1 :
Les traités de Westphalie de 1648 consacrent le triomphe de l’État territorial et mettent en place les conditions d’un ordre européen fondé sur l’équilibre des puissances.
Forcément instable, régulé par la guerre quasi permanente et scandé par des traités de paix nécessairement éphémères, cet ordre n’en organisera par moins l’Europe jusqu’à son remplacement par un ordre inédit, fondé non pas sur l’équilibre des puissances, mais sur l’équilibre de la terreur. […]
Un petit XVIIIe siècle, entre la paix d’Utrecht de 1713i et la Révolution française, marque l’apogée de l’État dans cette première modernité. […] C’est le temps de ce que j’appelle la guerre rationnelle, autrement dit un affrontement dépouillé de toute idéologie autre que la raison d’État. C’est la guerre théorisée par Carl von Clausewitz, qui reste un homme des Lumières. Ce n’est pas un hasard si le général prussien définit la guerre comme un duel dont la finalité est d’imposer sa volonté à l’adversaire, ni s’il y voit, définition célèbre entre toutes, la poursuite de la politique par d’autres moyens.
[…] C’est la forme de guerre la plus civilisée de l’histoire militaire : une affaire de professionnels qui appartiennent au même monde, parlent la même langue, et obéissent aux mêmes codes sociaux. […]
Pourtant, Clausewitz a été le témoin et acteur du début de la deuxième ère guerrière, inaugurée par la Révolution française. Conséquence logique de la souveraineté populaire, la levée en masse marque le passage d’un ordre militaire à la nation en armes – et bouleverse le champ de bataille. On ne se bat plus pour le roi, mais pour la nation, idée abstraite qui permet à l’État, un État entendu comme la chose de tous, de mobiliser toutes les ressources humaines et matérielles du territoire qu’il contrôle.
Clausewitz comprend cela. Il voit bien pourquoi les armées professionnelles d’Ancien Régime étaient incapables de « montrer aux extrêmes » et comment la massification des armées nationales permettait désormais de mener une guerre « absolue », autrement dit libérée de toute entrave et bénéficiant d’une mobilisation sans précédent des ressources humaines et matérielles de la nation. […]
En effet, sous les yeux étonnés de l’Europe monarchique, la guerre vient de changer de nature. Elle devient un fait social total, […] et visera moins à établir un nouvel équilibre des puissances qu’à asseoir une domination définitive, ou du moins durable.
Elle supposera la fusion entre le peuple et son armée. Et elle s’habillera désormais des oripeauxii de l’idéologie : nation, classe ou race.
Élie BARNAVI, Dix thèses sur la guerre, Paris, Flammarion, 2014